Van Keirsbilck Felipe
Pour une société séparée
Le paradoxe du modèle actuel de représentation sociale des conflits est bien là : tandis que la mondialisation et l'épuisement des ressources radicalise l'effet du conflit salarial dans le réel, exacerbant indirectement d'autres conflits, sa représentation dans les formes imparfaites mais efficaces de la "société paritaire" est rendue difficile et illisible.
Auparavant, être exploité, pouvoir le dire collectivement, et pouvoir agir collectivement sur le mécanisme même de cette exploitation, était une façon de faire partie de la société: vous étiez forcément d'un côté ou de l'autre de la ligne (ou de l'une des quelques lignes) qui divisait la société, et si vous étiez du mauvais côté, du moins vous restait-il la lutte – la vôtre ou celle de vos représentants.
Aujourd'hui que le cercle se forme et se ferme autour de tables rondes où un pouvoir qui se dissimule invite des experts pour modaliser, sur fonds de consensus postulé, "les mesures qui s'imposent", il n'y a plus guère de place pour les "contre".